Césaire dans son île, rencontre Breton, Masson, Péret, Lam. Dimanche 5 janvier 2014 à 10h
Dans le cadre de l'exposition Aimé Césaire, Lam, Picasso " nous nous sommes trouvés", Gilbert Pago animera la conférence: Césaire dans son île, rencontre Breton, Masson, Péret, Lam.
Avril 1941, les forces nazies et fascistes tiennent sous leur joug l’Europe (sauf le Royaume Uni), contrôlent l’Afrique du Nord et le Proche-Orient, submergent le Pacifique asiatique par les troupes japonaises. Des personnalités progressistes étasuniennes sollicitent avec insistance les autorités de leur pays à obtenir que de nombreux réfugiés dans la zone libre de la France vichyste puissent bénéficier de visas pour échapper à une mort certaine en cas de capture par les nazis et les fascistes. Ces potentiels condamnés à mort et ces réels bannis, hommes et femmes, sont des artistes, des intellectuels, des financiers. Ce sont des juifs, parmi lesquels Guggenheim ou L’ethnologue Levy-Strauss. Ce sont des surréalistes parmi lesquels Breton, Masson et Péret. Ce sont des révolutionnaires, membres rescapés des brigades internationales parmi lesquels Wilfredo Lam, revenant de la guerre d’Espagne contre Franco qui a triomphé en 39 (Il n’y a que deux ans ! ). Ce sont des anarchistes comme Victor Serge. Ce sont des amis de Trotsky dont les parents, les amis proches succombent sous les attentats diligentés par Staline. Et pourtant, alors qu’il « fait minuit dans le siècle », ils et elles ont une telle vitalité, une telle créativité, une telle combativité !
De Marseille, vers l’Afrique du Nord en continuant le long du Sénégal et en traversant l’Atlantique vers la Martinique (centre stratégique et opérationnel de l’armée française en Amérique), voici la route dangereuse que les sous-marins allemands en maugréant tolèrent pour quelques navires marchands ou ramenant des vaincus de la Blitzkrieg. « Le Capitaine Lemerle », un paquebot en forme de rafiot, véritable taudis, a fait lui aussi ce trajet et arrive en Martinique avec ces proscrits, mis au camp de concentration du Lazaret car ils doivent repartir en passant à Saint-Domingue vers Cuba, le Mexique du président Cardenas ou les Etats-Unis. De ces révoltés en fuite, quelques uns d’entre eux auront cette inestimable occasion de rencontrer les rédacteurs de Tropiques qui sous « l’ombre de l’amiral Robert » se réclament fils d’esclaves et porteurs d’idéaux de libération. Les échanges furent culturels avec tout ce que nous savons de leur prodigieuse succulence mais n’ont-ils été que ceux là ? Breton qui vient de perdre atrocement son ami Trotsky, assassiné huit mois plus tôt, qui a été arrêté dans une manifestation anti-Pétain à Marseille, qui est interdit de donner quelque conférence que ce soit en Martinique, Lam revenant d’Espagne, deux ans plus tôt, après la défaite des républicains, ne peuvent pas ne pas avoir en parlé avec Césaire dans cette Martinique vichyste. Quelles suites ? Quelles hypothèses ? Quels indices ? Quelles pistes de recherche ?
Une grande rencontre intellectuelle et artistique mais aussi la rencontre politique dans la Martinique du « Tan Wobè » des résistants européens au Nazisme et de l’éveil d’une conscience à la négritude et d’une Martinique à changer.
Gilbert PAGO
Agrégé d’histoire
Ex-enseignant d’histoire à l’université des Antilles et de la Guyane.
Ex directeur de l’I.U.F.M de la Martinique.
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